Comment calculer le coût des subventions

Réponse à M. Germain Belzile de l’Institut économique de Montréal (IEDM)
20 mars 2018

L’Institut économique de Montréal (IEDM) estime que le montant de 8 000$ accordé en subvention par véhicule 100% électrique risque de coûter « des centaines de millions, voire des milliards aux contribuables ».
La cible du gouvernement est de 100 000 véhicules électriques en 2020, mais le budget du gouvernement pour la subvention se limite à 125M$. Cette somme ne vise donc pas à subventionner la totalité de sa cible, sinon le budget serait de 800M$. Contrairement aux hypothèses soulevées par M. Belzile, le gouvernement n’a pas l’intention de subventionner éventuellement 1 million de voitures (cible en 2030), soit 8 milliards de dollars.
L’actuelle subvention à l’achat d’un véhicule électrique est une mesure parmi d’autres, comme la Loi zéro émission, ayant pour but d’accélérer la transition technologique vers l’électricité afin que le marché devienne compétitif et que les subventions ne soient plus nécessaires.

Qui plus est, les subventions sont à coût nul pour l’état québécois. Voyons pourquoi.
Les gouvernements de la plupart des pays font des choix, donc celui de subventionner temporairement la filière électrique, ou de taxer lourdement la voiture à essence (Norvège) afin d’accélérer la transition technologique. Le gouvernement québécois a mis sur pied un Fond vert et un marché du carbone. Les crédits de carbone que les pétrolières doivent acheter représentent à la pompe l’équivalent de 2 sous le litre d’essence, ce qui représente environ 35$ par année par automobiliste. Les crédits de carbone versés au Fond vert couvrent plus que le coût des subventions. Le gouvernement a choisi d’appliquer une politique de façon à limiter les impacts économiques sur les automobilistes.

Les subventions de 8 000$ ne coûtent donc pas un sou à l’état, comme elles sont payées indirectement par les utilisateurs de voitures à essence.

L’IEDM affirme aussi que le coût de la subvention par rapport à la tonne de carbone est démesuré. Faisons un peu de mathématique. La méthode de calcul de certains économistes contre les subventions est la suivante: un véhicule 100% électrique permet d’éviter environ 3 tonnes de CO2 par année, donc 30 tonnes sur 10 ans, soit la durée de vie hypothétique du véhicule. 8 600$ de subvention par véhicule (incluant la borne) représentent donc près de 288$ la tonne. Le marché du carbone en ce moment étant à 17$, la facture semble effectivement très élevée. Pourtant il n’en est rien, preuve encore une fois que l’on peut faire dire ce que l’on veut aux chiffres. Tel que mentionné, le gouvernement n’a pas l’intention de subventionner pour toujours les véhicules électriques. Sa cible de 125M$ vise donc les 15 000 premiers véhicules électriques. Lorsque nous aurons atteint 100 000 véhicules, le coût amorti des subventions sera donc de 1 250$ par véhicules, soit 42$ la tonne. Lorsque nous atteindrons 200 000 véhicules, le coût sera de 625$ par voiture, soit 21$ la tonne, etc. Je pense que vous avez compris le concept.

Certains économistes ne semblent pas comprendre le principe du coût amorti.

Dans un monde idéal, il n’y aurait pas de subventions. Si la voiture à essence semble, à première vue, moins chère que la voiture électrique, c’est parce qu’on ne prend pas en considération le coût des externalités, c’est-à-dire tous les coûts relatifs à la durée de vie utile du véhicule à essence, les coûts de dépollution, les coûts de santé occasionnés à la société, et le coût des subventions et avantages fiscaux des pétrolières depuis des décennies, etc. Si d’un côté on décidait de ne pas subventionner la voiture électrique et de la vendre sur le marché au coût réel, en vertu de quel principe économique ne faudrait-il pas faire la même chose avec les voitures à essence et les vendre à un prix qui inclurait également tous les coûts ? La question se pose.

Si l’Institut économique de Montréal veut absolument introduire le principe de l’utilisateur-payeur et abolir les subventions, il faudrait logiquement qu’elle accepte de hausser le prix des voitures à essence pour y inclure le coût réel et de vivre avec les conséquences de ses idéologies. On ne peut pas prêcher une théorie et son contraire.