Légiférer ou pas?

Loi zéro émission
4 août 2017

Encore une fois, l’industrie automobile tente de ralentir le transfert technologique de l’essence vers l’électricité, un transfert nécessaire et déjà amorcé dans la plupart des pays démocratiques, et cela sous différentes formes. Le Québec a choisi de légiférer en instaurant une loi zéro émission.

L’industrie automobile et sa filière ont eu amplement l’occasion de présenter leurs arguments contre la loi zéro émission en commission parlementaire et par le biais des médias. Les partis politiques québécois ont appuyé à l’unanimité l’adoption de la loi zéro émission en octobre 2016… à l’unanimité! Aller à l’encontre de ce fait est anti-démocratique.

La voiture électrique n’a pas à rencontrer les mêmes critères commerciaux que la voiture à essence. Logiquement, nous ne devrions plus avoir de discussion sur les choix possibles entre une voiture polluante et une voiture non polluante. A partir du moment où la voiture à essence a un substitut, ce qui est le cas maintenant, il faut se faire à l’idée et aller de l’avant, et ceci est particulièrement vrai au Québec, paradis de l’hydro-électricité.

Depuis l’apparition des voitures électriques sur le marché, il y a quelques années, on nous a répété sans cesse que ces véhicules sont trop chers et qu’ils n’ont pas assez d’autonomie. Pourtant, l’autonomie a pratiquement triplé (Chevrolet Bolt) et il n’est plus nécessaire de payer plus de 100 000$ (Tesla) pour se la procurer. Ces jours-ci, l’IEDM nous informe que la technologie n’est pas encore prête. Que faut-il maintenant pour satisfaire l’IEDM? 1 000 km d’autonomie? une voiture solaire? la fusion nucléaire?

L’instauration de la loi a pour but d’accélérer un mouvement trop lent vers l’électricité à cause d’une industrie qui prône le statuquo. L’industrie peut faire mieux et plus rapidement. Si elle avait fait preuve de bonne foi envers la filière électrique, il n’y aurait pas de loi zéro émission.

Faut-il rappeler que l’essence une fois brûlée est un gaz mortel. Y-a-t-il beaucoup d’appareils en vente libre qui peuvent laisser échapper un gaz mortel? Il se vend plus de 450 000 voitures neuves au Québec à chaque année. Le lobby du pétrole est si puissant et si efficace qu’il nous amène à penser que la voiture à essence est irremplaçable. Il existe maintenant un substitut à la voiture à essence et c’est la voiture électrique. Qu’on le veille ou non, il faudra s’adapter aux changements technologiques, comme nous avons dû le faire dans le passé avec d’autres technologies dans différents domaines. A moins bien sûr qu’on trouve une meilleure solution.

Renversons donc plutôt le fardeau de la preuve. Écoutons les arguments de l’industrie automobile pour trouver des solutions concrètes et immédiates. Les manufacturiers automobiles sont riches en ressources financières, humaines et scientifiques pour développer les innovations technologiques requises pour nous sortir de l’ère du pétrole.

Si on ne peut pas se fier aux manufacturiers automobiles, le gouvernement se voit alors obligé de légiférer, il n’y a pas d’autres alternatives. L’industrie n’a qu’à s’en prendre à elle-même pour son manque de vision et sa résistance au changement durant les dernières décennies.

Les manufacturiers ne veulent pas de loi, mais sont bien heureux que les gouvernements subventionnent la voiture électrique. Ceci leur permet de maintenir des prix plus élevés. La loi zéro émission vient équilibrer le rapport de force et accélérer le mouvement vers le consommateur. Les subventions, temporaires durant l’introduction de la technologie, sont compensées par l’imposition de quotas, bien minimes, variant entre 1 et 3% des ventes. La France et la Grande-Bretagne ont décidé de bannir complètement les voitures à essence en 2040. Ceci équivaut à 4,5 % par an de ventes de voitures électriques, à la condition de commencer maintenant.

L’opération est à coût nul pour l’état. La perte de taxes sur les carburants est compensée par la vente d’électricité, provenant des surplus d’Hydro-Québec, et par l’activité économique provenant de la diminution des importations de pétrole, qui siphonnent l’économie québécoise de 14 milliards par année. Chaque 1% de la flotte de voiture transformé en voiture électrique, permet de réduire de 140 millions annuellement le déficit commercial du Québec.

Quant aux subventions, une simple taxe sur l’essence de 2 cents le litre suffirait pour les financer. Une forme de bonus malus, qui existe dans de nombreux pays, à des niveaux beaucoup plus élevé. 2 cents représentent environ 35$ par année pour l’automobiliste moyen. Existe-t-il un automobiliste sur terre qui ne peut se payer un imprévu de 35$ par année, et ce pour avoir le droit de continuer à polluer librement? Désolé d’être aussi direct, mais les arguments qui sont amenés sur la place publique par les partisans du statuquo nous forcent à dire les choses telle qu’elles sont.

L’IEDM avance que le coût du programme fera augmenter le prix des voitures à essence de 175$. Bien que cela n’a été observé nulle part ailleurs ou de telles législations sont déjà en place, pour les manufacturiers qui ne voudront pas offrir de voitures électriques, le coût des crédits augmentera inévitablement leurs dépenses. Ceux qui en vendront n’auront pas à payer ces crédits. On peut compter sur le système capitaliste pour équilibrer les prix, cela s’appelle la compétition.

La voiture électrique est une bonne chose pour le citoyen, pour l’état et pour l’environnement. Elle est fiable et agréable à conduire. La technologie est prête et testée depuis longtemps. Les économies de carburants et de frais d’entretien, ainsi que la subvention à l’achat font qu’elle se compare en terme de coût à une voiture de 20 000$. Le prix moyen payé au Canada pour une voiture neuve est de 26 000$. Il est faux de dire qu’elle est chère, ce n’est plus vrai.

Pour terminer, nous encourageons vivement les manufacturiers automobiles à soumettre des propositions plus efficaces que la voiture électrique afin de réduire les gaz à effet de serre. En attendant, le gouvernement doit continuer à légiférer afin de les aider à réfléchir.